mardi 23 juin 2009

Chemin hérétichuménal - témoignage



Ça fait un petit temps depuis que je veux vous parler de mon expérience au sein du "Chemin néocatéchuménal", le mouvement dont je vous parlais l'autre jour. Pour ne pas blesser les personnes, je remplace les prénoms par des pseudonymes, et j'abrège les toponymes. Ce ne sont pas aux personnes que je m'attaque, mais aux hérésies du mouvement.

Avant de commencer, il y a deux précisions importantes que je devrais vous faire, pour que vous compreniez la suite.

1. Je me suis converti au Christ quand j'étais encore adolescent, suite à la lecture du livre Cur Deus homo de saint Anselme de Cantorbéry. Ma conversion a été un grand événement de ma vie, et c'est à partir de là que toute ma vie ecclésiale a commencé.

2. Peu de temps avant de connaître le Chemin néocatéchuménal, j'ai été mis à la porte du séminaire. Officiellement on m'a reproché une immaturité. Mais la vraie raison, qui m'a été dite à plusieurs reprises, c'est que j'avais:
(a) montré du doigt des hérésies et immoralités des livres de Catherine De Hueck Doherty, ainsi que le danger de Madonna House; mais pour ce qui est de mon expérience avec les Madonnas, ce sera pour un autre article;
(b) critiqué le Novus Ordo, spécialement la Liturgie des Heures et son rejeton La Prière du Temps Présent, ainsi que les pseudo-anaphores de Bugnini;
(c) critiqué le pape Jean-Paul II à cause de la rencontre d'Assise, et ceci uniquement dans le confessionnal; le prêtre Henryk Kazaniecki a trahi le secret confessionnal devant les profs du séminaire, en racontant ce que je lui avais raconté pendant ma confession sacramentelle.
(d) je ne crois pas aux "apparitions" de Beauraing, Banneux, Lourdes, Fatima etc.
(e) je crois à la doctrine de l'expiation et je suis un adepte du créationnisme scientifique.

Comme je venais d'être éjecté du séminaire, l'évêque voulait que je poursuive mes études à l'unniv, et en même temps d'être en stage paroissial dans les villes de C et J; plus tard je devais entrer dans un autre séminaire, afin de compléter ma formation.

Avent que j'arrive à C, les précédents stagiaires avaient été deux séminaristes Redemptoris Mater (néocat´), disons Biancu et Paolo. De mon point de vue, c'était des gars bien. D'ailleurs Biancu m'avait soutenu moralement à plusieurs reprises.

Donc voilà, j'étais dans la ville de C. À vrai dire, à ma connaissance, c'est la paroisse la plus active liturgiquement dans notre pays. Tous les jours, à la collégiale, il y a au moins une messe, laudes, vêpres, 4 chapelets, adoration eucharistique perpétuelle, angélus trois fois, un office en l'honneur de la passion du Seigneur, programme de confessions; toutes les semaines il y a les rencontres des cellules paroissiales (homegroupes), prière avec les enfants tous les jeudis, groupe de louange deux fois par semaine, pastorale des malades, des sœurs qui nourrissaient les sans-papiers, des visiteuses de prisons etc. En tout cas, si on entre dans la chapelle de la collégiale à n'importe quelle heure du jour, il y aura toujours un office liturgique, ou l'adoration eucharistique.

Mais je n'étais pas le seul arrivé dans la paroisse; il y avait aussi un nouveau vicaire, qu'on va appeler Alberto, d'origine sud-américaine, fraîchement ordonné prêtre, après ses études au séminaire Redemptoris Mater. Alberto était un gars très discret. Tous les jeudis il y avait le déjeuner des membres de l'équipe pastorale, mais Alberto n'y venait quasiment jamais. (À vrai dire, il est venu deux fois, en retard, il n'a pas mangé, et il est reparti aussitôt.) Dans le village qu'il administrait il a refait complètement l'église et s'est fâché avec l'architecte, parce que ce dernier avait refusé de placer l'autel dans la nef, contre un mur de la nef. Alberto aurait voulu avoir dans l'église les gens à sa droite et à sa gauche et célébrer face au nord, tandis que les gens des deux côtés se regarderaient face à face. D'après lui, cette disposition était le fruit de la "réforme liturgique voulue par le Concile", et cela aurait permis l'utilisation de l'église villageoise par des «communautés néocatéchuménales». C'est pour la première fois que j'entendais ce mot, mais je pensais qu'il avait quelque chose à voir avec les vrais catéchumènes...

Quelques mois plus tard, le doyen voulait introduire une nouvelle méthode d'évangélisation, vu que les cellules paroissiales ne donnaient pas beaucoup de résultats. Pour ma part, je soutenais l'idée des cours alpha, tandis que le vicaire Alberto nous a parlé du «chemin néocatéchuménal». L'équipe pastorale s'est réunie, mais ce qu'Alberto nous a dit du "chemin" se résumait en ceci: des laïcs allaient venir dans la paroisse et faire des catéchèses pendant deux mois. Lorsque les autres membres de l'équipe pastorale, notamment le Père JM, ont demandé un plan des catéchèses ainsi que l'identité des catéchistes, Alberto nous a répondu que les catéchèses étaient improvisées sur le champ, sans plans, et que le contenu des catéchèse serait adapté spontanément à la nature public, c'est pourquoi, disait-il, on ne saurait rien mettre par écrit.

Quant à moi, mon souci était plus profond. J'avais deux questions. 1. Comment peut-on évangéliser en un espace de deux mois? Si on organise des catéchèses, autant prendre les cours alpha, qui durent plus longtemps, et qui ont une suite. 2. Ces catéchistes, qui allaient loger chez Alberto, est-ce qu'ils n'ont pas un job? Comment peuvent-ils se libérer pour deux mois? À ma première question, on m'a répondu que ces catéchèses néocatéchuménales donnaient du résultat, qu'elles étaient approuvées par Rome et que je ne devais pas me faire des soucis, mais croire à la puissance du Saint-Esprit. Quant à ma seconde question, on m'a répondu que ces catéchistes itinérants vivaient des dons et qu'ils n'avaient pas de job, car trop occupés avec les catéchèses. Du coup, ça sentait mauvais, car les gens qui évangélisent sans avoir de job, j'en connais quelque chose à travers ma rencontre avec les Madonnas, et je sais que dans tous les cercles fanatiques c'est comme ça que ça se passe. Les catéchèses allaient commencer dans quelques mois. Le doyen m'a dit: «Si ça marche, tant mieux; si ça ne marche pas, on essayera les cours alpha.»

Entre temps, Paolo m'invite à son ordination diaconale. Celle-ci se passait dans la paroisse de J, mais la célébration n'était pas animée par des gens de J, mais par des gens venus des villes de L et Sch. Mais cela, je ne le savais pas. C'était la première fois que je participais à une eucharistie néocatéchuménale, en croyant que c'était la façon de célébrer propre à la paroisse de J. J'étais ému jusqu'aux larmes, car dans la célébration il y avait beaucoup de points positifs. Les chants étaient bibliques, au contraire des chants à deux balles qu'on utilise d'habitude dans la plupart des paroisses francophones. Les chants étaient chantés par toute l'assemblée. Le baiser de paix s'est donné avant l'offertoire, comme dans les rites milanais et mozarabe, ce qui m'a plu énormément (car c'est en conformité avec Matthieu 5:23-24, et qui permet de ne pas se promener dans l'église pendant la fraction!). Ensuite, à l'offertoire il y avait d'immenses patènes avec du pain de messe, comme avant le 9ème siècle et comme dans certains rites orientaux. Ce pain avait été fait par les fidèles mêmes, encore un point positif. On a apporté plusieurs calices immenses remplis, ce qui est de nouveau conforme à l'Évangile, à la Tradition et à l'histoire. Jusqu'ici tout va bien, tout est archi-correcte!!!

De retour à C, je me suis dit que j'allais demander au doyen de me permettre d'aller tous les dimanches soir à la messe "extraordinaire" de J. En ayant pris contact avec une paroissienne de J, elle m'a répondu que cette messe-là était une exception, et que les paroissiens avaient même été écartés pour permettre aux gens venant d'autres villes de préparer la messe. «Je me sentais très mal à l'aise dans ma propre église, à une messe animée par des gens que je ne connais pas, qui venaient de je ne sais où.»

C'est à ce moment-là que Biancu m'a dit: «Tu vois, Georges? C'est suite aux catéchèses néocatéchuménales que ces gens-là se sont convertis, et tu vois quelle belle eucharistie ils ont préparée.» Du coup, je ne me posais plus trop de questions, et j'étais en faveur de l'introduction du néocat´ dans ma paroisse à C. Je pensais que les catéchistes devaient seulement catéchiser, puis s'en aller définitivement après deux mois, et que les célébrations archi-correctes allaient juste s'appliquer à l'une des quatre messes dominicales qui ont lieu toutes les semaines dans la collégiale de C.

Les catéchèses ont commencé à C et à J en parallèle. Elles ont été données par quatre personnes, qu'on appellera Giovanni, sa femme Darlène, le laïc célibataire Basile, et le prêtre Pinocchio. La plupart de ceux qui écoutaient les catéchèses étaient des gens déjà engagés dans plusieurs mouvements de la paroisse. Mais il y avait aussi deux ou trois personnes qui avaient quitté l'Église, et qui maintenant venaient aux catéchèses (mais ces personnes ont abandonné après trois ou quatre réunions).

Au début j'ai été plaisamment surpris par la doctrine sola gratia qui étaient enseignée. D'ailleurs elle correspondait à la déclaration commune signée par Ratzinger et les luthériens. Giovanni faisait bien la différence entre la justification et la sanctification. Sur ce point il était très orthodoxe et bien documenté. Mais cette orthodoxie ne dura pas longtemps.

D'abord, Giovanni nous a dit que le monde n'a pas été créé bon dès le commencement; que la perfection n'était qu'un plan de Dieu, et que la chute n'avait jamais existé, car l'espèce humaine serait née dans le péché dès le premier instant. Du coup, pas de révélation divine, pas de protévangile. Pour lui, Dieu ne s'était jamais révélé dans l'Ancient Testament, mais seulement au cœur d'Abraham. Or cette opinion n'est pas du tout orthodoxe. Pour ce qui caractérise le judaïsme, c'est d'être une religion révélée, avant que Dieu s'incarne. Or les catéchistes n'y croyaient pas.

Un jour j'ai entendu une chose qui m'a terrifié: «Vous croyez que Dieu a besoin du sang de son Fils? Mais quelle espèce de Dieu nous avons imaginé? Nous sommes parvenus à croire que Dieu aurait besoin du sacrifice de son Fils sur la croix, pour expier nos fautes, comme un dieu païen! C'est pour ça que les athées nous reprochent de croire en un dieu sanguinaire, qui déverse sa colère sur son Fils, pour la châtier à cause de nous. Et ils ont raison.»



Là, trop is te veel. Je comprenaient pourquoi ils ne croyaient pas à la rédemption. Enfin... Disons que le Cardinal Danneels ne croit pas non plus à l'expiation, et énormément de théologiens n'y croient pas non plus. C'est pourquoi, je me suis dit que les catéchistes étaient juste dans le même courant. Ceci me faisaient très mal, car s'il n'y avait pas eu la doctrine de l'expiation, je ne serais jamais devenu chrétien, et aujourd'hui je serais juste un musulman pieux. Mais soit! La doctrine de l'expiation figure dans l'épître aux Hébreux, dans saint Paul aux Romains et dans la première épître de Jean, dans saint Irénée, saint Athanase, Théodoret de Cyr, pseudo-Ambroise, Augustin, mon brave Anselme et dans Luther. Maintenant le catéchiste faisait un amalgame entre l'expiation de la Tradition et la punition à la Calvin. Mais bon, aujourd'hui il y a très peu de chrétiens qui y croient encore. Je ne pouvais pas reprocher ça à ces quatre catéchistes, sinon j'aurais pu m'en prendre à mon évêque et à Danneels...

La façon dont Giovanni définissait la grâce était hérétique. D'un côté il contestait l'image de Dieu dans l'homme. Pour lui l'homme était guidé par le serf-arbitre, n'était pas responsable de ses péchés. Mais d'autre part l'homme devait se sauver soi-même en aimant son ennemi. Et la grâce? Eh ben la grâce n'avait plus rien à faire là-dedans. Quand Giovanni avait utilisé le mot «grâce» lors de la seconde soirée, il avait dit ça dans le vent. Car pour lui, la grâce, c'est le fait d'être sauvé au bout du compte, à la parousie, en vertu de tes efforts de te sauver toi-même pendant ta vie. D'ailleurs, pour le catéchiste il n'y avait aucun lien entre la grâce et les sacrements; pour lui les sacrements n'étaient pas des signes visibles de la grâce invisible, mais seulement des figures de l'amour du Christ. Donc clairement sa sotériologie était d'un pélagianisme de basse espèce pétri d'anthropologie calviniste.

Toutefois, à l'époque je ne pouvais pas croire que tout le mouvement fût hérétique. Je croyais que seulement Giovanni avait mal compris la doctrine chrétienne. Donc en pleine catéchèse j'ai contredit le catéchiste, avec des arguments bibliques et patristiques. Il m'a répondu: «Ne m'interromps pas, stp. Si tu ne comprends pas quelque chose, je te l'expliquerai après la catéchèse.» En effet, après la catéchèse il m'a dit que je ne connaissais rien, que lui il connaissait tout, que la catéchèse telle quelle avait été approuvée par Rome, que je devais changer d'avis...

Après cela, nous avons eu la célébration pénitentielle, pendant laquelle j'étais un peu dérangé par les chants. Je voyais que les gens se confessaient très vite, alors que la confession sacramentelle doit laisser place à des conseils spirituels. Mais je me disais que le temps ne le permettait peut-être pas. Mais je continuais à me poser la question: comment Giovanni peut-il nous inciter à nous confesser, alors qu'il ne croit pas à l'efficacité des sacrements? Je continuais à croire que le mouvement néocatéchuménal était bon, et les catéchistes mauvais.

Nous sommes partis en convivence à Margutte. J'ai été très dérangé par le truc mystico-gélatineux de vendredi soir, où Pinocchio est entré avec le cierge pascal allumé, dans le noir total. Je me disais que ça aurait pu avoir un sens à la messe dominicale, mais pas avant une catéchèse!

Par contre, j'ai énormément apprécié la catéchèse de samedi. Contrairement à ce qui se passe d'habitude, les catéchistes n'ont pas contredit la doctrine de la transsubstantiation, mais ont beaucoup insisté sur la présence réelle. Ce fut pour moi un enrichissement. On a parlé aussi de la forme des basiliques antiques (ce qui n'est pas prévu par les cahiers de Kiko). Je peux dire qu'en général ce qui a été dit sur la Pâque et sur la présence réelle était orthodoxe. D'ailleurs c'est Darlène qui a fait quasiment toute la catéchèse, car Giovanni et Basile étaient très fatigués, et le français de Pinocchio était très mauvais, voire incompréhensible. Toutefois Giovanni nous a raconté plusieurs conneries. D'abord il contestait l'existence de l'offertoire: «Dieu n'a pas besoin de ton offrande! Nous sommes trop habitué aux sacrifices païens et à la structure de la messe tridentine, c'est pourquoi, à la place de l'offertoire, le pape Paul VI a quand même introduit deux prières juives.» Ensuite: «Le pape Paul VI, avec l'aide des liturgistes éminents, a restauré la prière eucharistique de saint Hippolyte, qui était utilisée dans le temps, avant que des gens aux idées païennes composent le canon romain.» Faux et archi-faux! Bugnini a créé ex nihilo une prière eucharistique qui correspondait à ses erreurs théologiques, alors que le canon romain date de temps immémoriaux!

Pendant la messe, j'ai été mal à l'aise de voir à quel point tout caractère pénitentiel était éjecté: pas de Confiteor, pas de Kyrie, pas de Agnus Dei, pas de prières avant la communion, pas de Domine non sum dignus.

Par contre, j'étais toujours ébloui par l'archi-correction des signes visibles: pain azyme pétri à la main et cuit au four, communion au calice. Sur ce point, je crois que l'enseignement des néocat´ est très juste: l'Église romaine s'est trompée grave, en refusant le calice aux fidèles. Ce n'est pas que le Christ ne soit pas présent dans le pain seul, mais l'essentiel n'est pas de prendre une "pilule de Christ", mais de mâcher et boire son corps et son sang. Ce n'est pas moi qui le dit, mais c'est la Tradition tout entière qui le dit.

Dimanche matin, aux "laudes", Giovanni nous prenait pour de la merde. D'après lui, tout ce que nous connaissions du Christ avant les catéchèse, c'était de la merde; par contre, le "Chemin" nous a tout apporté; avant le "Chemin" j'étais un païen, maintenant je suis sur la bonne voie. Mais malgré tout, d'après les catéchistes, nous étions seulement des pré-catéchumènes. Ouf! Ces paroles m'ont fort blessé. Pinocchio a rajouté une couche, en répétant trois ou quatre fois au cours de la matinée: «Avant vous n'étiez rien. Heureusement que l'Église nous a envoyé un chemin de salut! Heureusement que le pape et Monseigneur l'évêque nous ont envoyé pour vous annoncer le kérygme!» Dans d'autres termes, ces quatre zozos prétendent m'avoir chistianisé, alors qu'ils ne connaissent que dalle de mon passé, de ma conversion, de mes larmes d'antan, de mes recherches, de mes nuits passées à lire et chercher une église, de ce comment j'avais appris la doctrine eucharistique en lisant le Nouveau Testament, et tout cela bien avant leur arrivée!!! Comment pouvaient-ils être si arrogants?

Mais les espèces eucharistiques, ainsi que le fait de célébrer la messe le samedi soir plutôt que le dimanche matin, comme dans le Nouveau Testament et comme avant la paix de Constantin, c'était l'argument décisif qui m'a tenu dans la communauté néocatéchuménale. Je me disais: «Georges, tu t'es battu tellement pour convaincre les soixante-huitards de donner la communion sous les deux espèces, et ils ne t'ont pas écouté. Georges, tu voulais tellement participer à la messe dominicale les samedis soir, et les Madonna House te l'ont interdit dans le temps. Maintenant ces catéchistes ont réussi ce que toi, tu n'as pas réussi. Maintenant tu as tout, tu as ce que tu cherchais.»

Mais de retour après la convivence, je m'attendais à ce qu'on calque la messe néocatéchuménale sur la messe habituelle paroissiale des samedis soir. D'ailleurs le curé fut de cet avis, ainsi que d'autres prêtres et quasiment tous les membres de la communauté toute récente. Les catéchistes ont répondu: «Non, il n'est pas question que des pré-chrétiens, c'est à dire des chrétiens de dimanche, viennent célébrer avec vous.» Mais c'était une aberration. L'eucharistie est toujours l'eucharistie de l'Église, de la paroisse, non pas d'un petit groupe. L'eucharistie n'est la propriété personnelle de personne, pour fermer la porte. D'ailleurs la messe du néocat´ était célébrée dans une salle paroissiale, alors que la collégiale ou la chapelle de la collégiale étaient disponibles. Ceci n'avait aucun sens ecclésiologique!

J'allais souvent dîner chez les bonnes sœurs, qui me mettaient en garde: «J'ai trouvé un texte sur internet, qui dit que c'est une secte.» Je répondais: «C'est ce qu'on a dit de votre congrégation aussi, au début de son histoire: on l'accusait d'être une secte.» Ensuite, elles - avec qui j'avais eu des disputes liturgiques - me disaient: «Vous faites la messe avec des pizzas.» Je répondais: «C'est du pain azyme comme celui qu'utilisait Jésus. Par contre, c'est vous qui avez tort avec vos chips de farine. Nous, qui sommes le corps du Christ unique, nous devons communier à l'unique pain.» J'ai profiter de ces attaques des bonnes sœurs, pour contre-attaquer leurs messes paillardes et leurs idées soixante-huitardes. Elles continuaient: «Vous ne faites plus partie de la paroisse, car vous avez votre messe privée.» Je répondais: «Dans ce cas-là les enfants ne font pas non plus partie de la paroisse, car ils ont leur propre messe; de même le quartier de B, vous mêmes, ainsi que ceux qui vont à la messe du dimanche soir, vous ne faites plus partie de la paroisse, car vous avez vos propres messes à des heures différentes. Si vous confondez "paroisse" et "grand-messe", vous n'avez rien compris.» Et là, j'avais raison.

Toutefois, la communauté néocatéchuménale brisait la paroisse, car ses membres étaient tous impliqués dans quelque chose d'autre. Les gens n'allaient plus aux cellules paroissiales, plus à la louange ou à l'adoration, plus nulle part.

Après cela, l'évêque m'a dit que je devais partir en stage à J, la ville où Paolo avait été ordonné diacre. Mais maintenant à la place de Paolo il y avait un nouveau vicaire à J, un prêtre néocat´ que nous appellerons Fernando. L'évêque m'a dit qu'à J je serais plus proche de la fac, et qu'en même temps Fernando était quelqu'un de très koel, qui allait m'aider dans ma vocation.

Arrivé à J, je fus accueilli avec un froid glacial par le curé soixante-huitard (qui sympathisait avec le néocat´ mais sans plus). Fernando était bienveillant envers moi, mais sans plus. Un troisième prêtre, ancien missionnaire en Afrique, était hostile au "Chemin"; un quatrième était hostile à tout le monde.

Mon expérience à J m'a complètement changé. Avant J, je savais que j'étais appelé à la fois à la prêtrise et à fonder une famille, mais j'étais disposé à renoncer à ma seconde vocation, afin de me donner à la première, dans l'abstinence et la continence, dans la prière et l'ascèse, dans la liberté et la Tradition. Une fois arrivé à J, j'ai constaté que ça ne valait pas la peine de devenir prêtre catholique romain au jour d'aujourd'hui. Tous les mardis il y avait le dîner des prêtres et collaborateurs du doyenné, et la plupart des prêtres se plaignaient du poids du célibat. En plus ils étaient très méchants les uns avec les autres. N'ayant pas de famille, certains d'entre eux arrivaient dans des homes (maisons de repos pour des personnes âgées), où ils ne se plaisaient pas. Je ne voulais pas arriver comme eux. Mais ceci est une autre histoire.

Ce qui m'a frappé dans la communauté néocatéchuménale de J, c'était l'hypocrisie. D'un côté, les catéchistes paroissiaux, qui préparaient les enfants pour la première communion et pour la communion solennelle, étaient quasiment tous des néocat´. Même le vicaire Fernando catéchisait les enfants. Pourtant rien ne les distinguait des catéchistes soixante-huitards. Ils utilisaient des livrets d'apostasie et préparaient les enfants à célébrer une messe ridicule. Par exemple, à la place de l'Agnus Dei, Fernando leur a appris la gnangnanrie «Donne la paix», et à la place du Kyrie il leur a appris «Venez, on va danser». Je lui ai dit: «Fernando, je ne comprends pas! À la comm´ on apprend qu'il ne faut pas faire comme les chrétiens de dimanche, alors que maintenant tu apprends aux gosses des chants d'apostasie.» Il m'a répondu qu'il fallait faire comme ça, pour donner aux paroissiens l'impression que les néocat´ seraient des gens comme tout le monde. C'est la réponse que j'ai eue de la part d'autres catéchistes d'enfants, qui sont des membres du néocat´. J'ai fait un questionnaire pour les enfants que j'enseignais, et j'ai constaté qu'ils ne croyaient pas à la Sainte Trinité et qu'il ne connaissaient rien sur le Christ. J'ai été voir l'évêque, qui m'a autorisé à faire ma propre catéchèse avec les enfants. Je leur ai appris la Trinité, la divinité du Christ, l'incarnation, le sacrifice sur la croix, la résurrection, le Saint-Esprit, les sept sacrements, chacun distinctement; je leur ai appris à prier et à chanter les psaumes sur les 8 tons grégoriens et la messe De Angelis. Du coup j'étais le mouton noir, à la fois pour les néocat´ et pour les soixante-huitards.

Un jour, à la convivence, pendant l'eucharistie, à la communion, Ivonnelle commença a pleurer à chaudes larmes. Son fiancé a communié, mais pas elle. On ne savait pas ce qui se passait. Avant la messe, le "catéchiste" néocat´, Giovanni, les avait engueulés tous les deux, Ivonelle et son mec, parce que ceux-ci vivaient en concubinage et n'étaient pas encore mariés. Il leur a interdit de communier. Toutefois, le fiancé d'Ivonelle n'avait rien à cirer de l'avis des catéchistes.

L'évêque m'a dit que la meilleure chose, pour moi, était d'entrer au séminaire Redemptoris Mater de notre pays, après quoi je deviendrais prêtre pour son diocèse. Je me suis réjoui, et j'en ai parlé à Giovanni. Il m'a répondu que si c'était le cas, on devait tirer au sort dans quel pays j'allais partir, et après cela on tirerait au sort dans quel autre pays j'allais poursuivre mon ministère. J'ai transmis cela à l'évêque, qui m'a dit: «Non, tu restera ici.» Quand j'ai communiqué à Giovanni la réponse de l'évêque, il m'a dit que personne n'était au-dessus des règles du Chemin néocatéchuménal, et que l'évêque n'avait qu'à obéir. Cela a commencé à me tracasser sérieusement. Je lui ai dit: «Voilà, Giovanni, j'ai tout quitté, j'ai pris des racines ici; mon psychique ne pourrait pas supporter un deuxième déracinement.» Il s'en foutait complètement. J'ai transmis à l'évêque que dans ces conditions-là, je ne pouvais pas entrer dans un séminaire Redemptoris Mater. «Mais Georges, tu disais que tu aimais le Chemin...» Je lui ai proposé de me laisser continuer mes études et m'envoyer ensuite au séminaire Saint-Paul à LLN. J'étudiais déjà la théologie à LLN, donc ç'aurait été facile. Mais l'évêque m'a laissé en suspens. «J'ai tout fait pour toi, et toi...»

C'est vrai. Il avait tout fait pour moi, l'évêque. Il m'a reçu dans son diocèse, il a continué ma formation, après que j'ai été éjecté du séminaire, il m'a envoyé à C pour être proche du doyen de C et de l'abbaye voisine, il a même payé mon minerval à la fac. Il est gentil, lui. Mais il n'est pas au-dessus des catéchistes du néocat´; il ne sait pas leur dire non. Quand les catéchèses avaient commencé, tout au début, l'évêque était présent et disait: «Je suis le premier des néocatéchumènes; je veux approfondir la foi de mon baptême.» Il avait raison pour la première partie de la phrase.

Un autre jour, il y avait une convivence spéciale. C'était la convivence des responsables & séminaristes. Même si je n'étais pas un séminariste, j'étais en train d'étudier la théologie à LLN, en vue de... L'évêque m'a envoyé un mail pour me dire de ne pas oublier d'aller à la convivence. Or sur la liste des participants, préparée par Giovanni, mon nom ne figurait pas. Je l'ai appelé pour demander quoi. Mais au lieu de s'excuser, il m'a répondu: «J'invite qui je veux à la convivence et tu n'as qu'à respecter mes décisions.» J'ai rétorqué: «Mais Monseigneur a dit que...» Et Giovanni coupe court: «Tu joues avec mes pieds. Pour cette fois-ci tu peux venir, mais dorénavant ce n'est pas à l'évêque de décider, mais à MOI!»

À une convivence plus large, j'ai assisté à une chose qui m'a horrifié. Appelés à confesser nos péchés dans de petits groupes, un responsable fut désigné pour chaque groupe, après quoi il y avait des confessions publiques. Un garçon a sorti, devant tout le monde (470 personnes): «Dans notre groupe, il y a une fille qui se drogue.» À ces paroles, dans la foule, une fille tombait dans les pommes. C'était la propre sœur du garçon qui parlait. Après cela il y a eu des anathèmes, de la part de Giovanni, contre la fille, contre ses parents, contre sa communauté, contre tout le monde. Pour chaque péché qui était évoqué, il faisait culpabiliser tout le monde.

Ensuite il y a une une autre convivence, où l'on nous a demandé si quelqu'un se sentait appelé à la prêtrise. Je me suis levé et j'ai fait un résumé pour dire que c'est ma vocation qui fait que je me trouvais dans le diocèse, et que c'est grâce à ma vocation que j'étais en formation pour la prêtrise. Giovanni m'a répondu: «Bravo! Mais sache qu'avant tu n'étais rien. Le Seigneur a mis un Chemin devant toi, pour te convertir.» Partis à une sorte de convivence pan-européenne, à Amsterdam, Kiko a posé la même question, si quelqu'un se sentait appelé à la prêtrise. Je suis descendu au milieu du stade, avec quelques dizaines d'autres garçons, j'ai reçu une bénédiction de la part d'un évêque, mais près cela, je sentais que j'allais quitter non seulement le "Chemin", mais aussi la formation auprès de mon évêque impuissant devant ces pseudo-catéchistes.

Entre-temps je correspondais avec un autre jeune néocat´ qui vivait en France. Son frère était séminariste, mais lui aussi, il voulait suivre ce chemin. Avant de connaître le "Chemin", ce garçon avait connu la foi grâce à un catéchisme d'avant-Concile. Il était, lui aussi, créationniste, expiationniste etc. Le pauvre garçon me racontait comment le catéchiste lui avait demandé de renoncer à ses «convictions personnelles», afin de «se laisser former par le Seigneur».

Tout ça, parce que le Chemin néocatéchuménal a une ecclésiologie des plus fausses. C'est une "église parallèle", avec sa hiérarchie de "responsables", "catéchistes", "catéchistes régionaux", nationaux et enfin Kiko, Carmen et Mario. Tout ça en parallèle, car ils se servent de la hiérarchie de l'Église locale et de l'Église hiérarchisée, catholique romaine, voire anglicane ou orthodoxe finnoise. Les "presbytres" sont des prêtres canoniquement incardinés, mais qui servent seulement d'instruments de consécration de la messe. Ces prêtres sont soumis, en parallèle, à leur évêque, à leur propre catéchiste et aux catéchistes des communautés néocatéchuménales dont ils sont les presbytres. Dans l'orthodoxie-catholicité, l'évêque est le pasteur de son diocèse; et s'il a besoin de délégués, ceux-ci sont les prêtres; eux, ils exercent le ministère de la Parole à l'égard de leurs ouailles. Les laïcs, par contre, ayant reçu la Parole de Dieu de leur évêque, la transmettent aux païens. Mais dans l'Église, depuis deux mille ans, on n'a jamais permis à un laïc d'exercer une autorité quelconque sur un autre laïc, et encore moins sur un prêtre ou sur un évêque. Un laïc a le droit d'avertir son évêque en cas de danger d'hérésie, et si l'évêque tombe dans l'hérésie, le laïc doit s'opposer à son évêque, mais sinon, un laïc ne peut pas devenir le père spirituel d'un évêque ou d'un prêtre!!! Or justement, les "catéchistes" s'érigent en pères spirituels de tous.

Quand j'ai quitté J, personne n'est venu me demander si j'avais un problème ou si quelque chose n'allait pas. Que du contraire, ils m'ont tous retiré de leurs listes de contacts. Certains ont même banni mon adresse e-mail car, peu après, lorsque j'ai voulu leur envoyé une félicitation de Noël, les mails sont revenus vers ma boîte. Lorsque j'en croise l'un ou l'autre, ils me méprisent et m'évitent. J'en ai invité quelques-uns à mon mariage, mais ils m'ont tous envoyé des lettres de refus contenant la doctrine du serf-arbitre. J'ai envoyé quelques lettres et mails à Fernando, qui entre temps est devenu curé, mais il ne m'a jamais répondu. Une fois j'ai été le voir au presbytère, mais au lieu de me recevoir, il m'a dit froidement qu'il avait quelque chose d'autre à faire.

Maintenant tout ce que je peux, c'est de prier pour eux et d'empêcher que ce fléau se répande. Je me sens gêné vis-à-vis de l'évêque, qui avait tout fait pour moi. Mais malheureusement maintenant il est aveugle. Il est séduit par le nombre fictif de convertis à travers le "Chemin". J'aimerais lui offrir des témoignages sur papier, mais je sais qu'il ne les lira jamais. Kyrie, eleison!

8 commentaires:

Dominique a dit…

Ne t'inquiète pas: tu as vu juste : le Chemmin Néocatéchuménal est un mouvement de type sectaire d'où nous sommes aussi sortis, il y a une dizaine d'années, ici à Hamme Mille (brabant wallon).
D'ailleurs toute la communauté a été dissoute à cause de notre combat. mais les Evêques (Mgr Léonard et consorts) eux, sont restés et veulent ! rester aveugles, car ils n'acceptent pas de se remettre en cause eux-mêmes et de devoir reconnaître qu'ils se sont plantés !
Si tu veux nous contacter, voici mon adresse e-mail : 777dpierre@skynet.be

Dominique

Albert a dit…

J'ai des néocatéchumènes dans ma belle famille. Vous semblez décrire ce que mon épouse a vécu avec eux. C'est vraiment un groupe sectaire qui gangrène une église que j'ai quittée. les communautés du CNC ne font que faire fuir les fidèles. Ce sont aussi des italiens qui mènent le bal en France avec des catéchistes itinérants. Quelle misère...

sociologiecnc a dit…

Benoît XVI est-il aussi hérétique de dire :

"Il me semble que la théologie devrait faire davantage pour comprendre encore mieux cette réalité de la réparation. Il y avait également de fausses idées dans l'histoire. Ces derniers jours, j'ai lu les discours théologiques de saint Grégoire de Nazianze, qui, à un certain moment, parle de cet aspect et se demande à qui le Seigneur a offert son sang. Il dit: le Père ne voulait pas du sang du Fils, le Père n'est pas cruel, il n'est pas nécessaire d'attribuer cela à la volonté du Père; mais c'est l'histoire qui le voulait, ce sont les nécessités et les déséquilibres de l'histoire qui le voulaient. L'on devrait entrer dans ces déséquilibres et là, recréer le véritable équilibre. Cela est véritablement éclairant. Mais il me semble que nous ne disposons pas du langage nécessaire pour que nous comprenions ce fait et que nous le fassions également comprendre aux autres. Il ne faut pas offrir à un Dieu cruel le sang de Dieu. Mais Dieu lui-même, par son amour, doit entrer dans les souffrances de l'histoire pour créer non seulement un équilibre, mais un surcroît d'amour qui est plus fort que l'abondance du mal qui existe. C'est ce à quoi le Seigneur nous invite.
Cela me semble une réalité typiquement catholique." (22 février 2007)

Anonyme a dit…

Je vie une experience completement differente dans le Chemin... Je trouve dommage que tu en parle de cette facon. Tu sais les cateshistes sont humains...ils font parfois des erreurs, mais parfois c!est nous qui ne sommes pas capable d'accepter les choses qu'ils disent ou parfois la facon qu'ils le disent. On interprete parfois...non?
Que le seigneur te benisse et te donne la Paix...

marc a dit…

je sais que tu ne publiera peut etre pas ce commentaire mais je peux te dire que tu te trompes. ou alors la ou tu étais c'était vraiment spécial. J'ai l'impression que tu retranscrit mal ce que tu as entendu, j'ai moi meme écouté la catéchèse et je chemine depuis longtemps et jamais je n'ai entendu ce dont tu parlais et pourtant comme toi j'étais méfiant et je me croyais mieux que tous. Le chemin m'a vraiment sauvé la vie, je l'ai quitté plusieurs fois parce que je n'acceptais pas de souffrir mais la vérité est dans le chemin et j'y suis toujours et cela me donne la vie que le péché originel nous a enlever ... tu disais que tu prirais pour que ce "fléau" ne se répande pas et bien en toute humilité je te dis que je prirais pour toi autant que j'en suis capable.

georges a dit…

@sociologiecnc: On s'en fout complètement de ce que dit tel ou tel pape. Il y a eu des papes hérétiques dans l'histoire. Ratzinger n'est pas au-dessus de la Tradition de l'Église, pas au-dessus des Conciles, pas au-dessus de l'Église. La citation que tu donnes est vague et inexacte; chacun peut l'interpréter comme il le veut. La Tradition de l'Église, au contraire, est sans équivoque.

@Anonyme: ce n'est pas une question de catéchistes. Tous les catéchistes doivent suivre les idées hérétiques de Kiko.

@marc: il est facile de dire des phrases dans le vent. Démontre, stp, ce dont tu parles, ou tais-toi. Ce n'est ni l' CNC, ni toi-même qui auriez enlevé le péché originel. Au contraire, selon l'enseignement de toujours de l'Église, le péché originel est effacé au baptême. Docteur, sauve-toi toi-même.

Anonyme a dit…

je confirme c'est un mouvement sectaire,les parents de ma belle fille en font partis , ils sont completement "barrés" et à la merci de ce mouvement, heureusement ma belle fille s'en est sortie , mais pas sans mal....

Christelle a dit…

Quand ils disent qu'ils n'ont pas de plan, de document pour la catéchèse qu'ils vont donner, ce n'est qu'un énorme mensonge (de plus). J'ai vu mes parents préparer plus d'une catéchèses, et ce pendant de nombreuses années. Dire que c'est l'esprit saint qui va inspirer et adapter à l'auditoire présent ce soir là n'est qu'une astuce de plus pour tisser plus tranquillement leur toile.

Christelle